SUPERSPACES

By Tom Scalabre, CO-OWNER / CREATIVE DIRECTOR chez SUPERBIEN
La numérisation et la virtualisation des événements sont actuellement un sujet brûlant. Bien que cela représente une opportunité de repousser les limites de la créativité, il est impossible d’échapper au prisme quelque peu réducteur à travers lequel nous vivrons ces expériences : L’ÉCRAN.
Et c’est sur cette source de lumière et d’informations, cette fenêtre ouverte sur le monde — ou les mondes — que je souhaite tout d’abord attirer notre attention : nous devons prendre le temps de reconnaître que notre champ de vision et notre appréciation d’un événement seront considérablement réduits si nous n’utilisons pas l’écran à son plein potentiel.
Les écrans ont le pouvoir magique de nous transporter où nous voulons, quand nous voulons, d’un simple clic. Cela peut sembler fantastique sur le papier, mais le problème avec la disponibilité instantanée à la demande est qu’elle supprime le sentiment de vivre quelque chose d’exceptionnel qui rend une expérience mémorable. Se sentir spécial et se connecter à un environnement ou à une situation, vivre une expérience unique même si des milliers d’autres personnes vivent la même chose au même moment.
Parce que le partage, le véritable partage, dans le sens où l’on partage un repas avec une autre personne plutôt que de prendre et de partager une photo de ce même repas, suscite des sentiments qui déclenchent une forte réaction émotionnelle.
Et l’empathie. En ces temps incertains, c’est peut-être ce dont nous avons le plus besoin. Alors oui, je crois au pouvoir des événements en direct et des moments d’émotions partagées. Mais tout cela doit être inclusif. Les nouvelles façons de vivre qui nous sont imposées par des considérations sanitaires et économiques nous confèrent une responsabilité : nos expériences doivent toucher le plus large public possible, quel que soit son mode de vie.
Pour moi, le sujet peut se résumer en une seule question, qui est presque devenue une obsession : comment créer des moments collectifs d’émotions partagées en exploitant la puissance des capacités numériques tout en se libérant des limites physiques de l’écran ?
En élargissant notre champ de vision et en reliant les deux mondes.
Nous cherchons tous notre chemin dans le conflit entre le numérique et le physique, l’un étant un reflet trompeur, l’autre étant la « vraie » réalité. Cette distinction a volé en éclats lorsque la crise mondiale que nous traversons actuellement a frappé. La vie professionnelle et les interactions sociales ne sont plus définies par le lieu. Cela a-t-il changé notre façon de voyager ? De nous voir les uns les autres ? De communiquer entre nous ? Nos sens eux-mêmes sont-ils en train d’être numérisés ?
Cette nouvelle réalité, libérée de toute frontière entre les deux mondes, continue de détourner notre attention vers ce qui devrait toujours être au centre de nos préoccupations : notre besoin de connexion, notre besoin de socialisation, notre besoin de partager des émotions.
Quelle émotion partagée peut faire tomber ces frontières au moment même où d’autres frontières très physiques réapparaissent ? Quels nouveaux ponts pouvons-nous envisager ou inventer ?
Je crois que : Le numérique et le physique ne sont pas deux espaces distincts. Ensemble, ils se combinent pour former un nouvel espace élargi, avec deux forces motrices qui se renforcent mutuellement. En comprenant cette nouvelle réalité, nous pouvons créer de nouvelles connexions et de nouvelles émotions partagées.

Comme nous tous, je souhaite voir le retour des événements physiques. Mais cette fois-ci, ils seront différents. Ils seront prolongés et probablement fragmentés, mais surtout, ils seront plus intimes. À l’avenir, le numérique ne sera plus un simple complément, mais plutôt une extension complète du physique. Et cette nouvelle réalité nous permettra d’établir une connexion réelle et instantanée entre les publics physiques et numériques, immergés dans un même environnement mais accessibles par des moyens différents.
Ce désir est aussi vieux que l’écran lui-même. Qui n’a jamais rêvé d’agiter son ticket d’or pour entrer dans un autre monde ? Last Action Hero ou Ready Player One, 25 ans d’écart et le fantasme reste le même. Relier les mondes et passer de l’un à l’autre, tout en emportant avec soi ses expériences et ses connaissances personnelles. Les jeux vidéo ont également ouvert la voie. Le rendu réaliste des décors et des interactions a aujourd’hui atteint un niveau incroyable, à tel point que la frontière entre les deux mondes s’est estompée jusqu’à devenir un point à l’horizon. Pourtant, cette frontière existe toujours. Car chaque joueur, même s’il joue avec d’autres personnes dans la même pièce, ne peut entrer dans le monde imaginaire qu’à travers son propre écran. Et si ce portail était partagé ? Et si tous les joueurs partageaient le même point de vue ? Si leurs actions étaient physiquement coordonnées dans le monde réel ?
Les espaces physiques partagés servent de portails vers le monde réel, étendu au domaine numérique. C’est dans cette direction que s’oriente le design expérientiel de SUPERBIEN.
Nous voulons repenser cet événement non pas comme un espace exclusif et cloisonné, mais comme un lieu élargi, relié à d’autres mondes par des ponts numériques, et partagé par un public qui vit ce moment autant physiquement que seul devant un écran.
La liberté de choisir son point d’entrée, son portail, la manière dont on accède à ces mondes, est profondément caractéristique des jeunes générations. Aujourd’hui, nous avons les moyens de rassembler les publics dans des mondes qu’ils peuvent partager, fusionnant rêve et réalité. Des mondes entiers créés pour le divertissement, l’éducation ou l’émerveillement, et façonnés par des marques, des institutions ou des artistes.
Au studio, nous adoptons une approche particulière pour sortir des sentiers battus.
Pour nous, il s’agit de concevoir « au-delà de l’écran ». Cela signifie que nous bouleversons les formats, jouons avec l’écran et le mélangeons avec des décors et des mises en scène, afin de supprimer complètement les frontières. Grâce au mapping vidéo, nous avons fait d’énormes progrès dans cette direction en transformant l’espace physique en une toile numérique. C’est avec cette même détermination et ce même enthousiasme que nous voulons aborder le changement de paradigme dans le secteur de la conception d’événements et d’expériences, en sortant des limites de l’écran avant de l’étendre à l’espace physique-numérique. Pour créer un voyage depuis l’espace physique vers l’espace visuel, jusqu’à l’espace mental du spectateur.


Pour ce faire, nous devons intégrer une nouvelle culture de l’image qui incarnera l’espace entre ces deux mondes, à la croisée de ce que nous pensons et de ce que nous ressentons. Nous devons conserver les repères rassurants de la réalité et laisser notre imagination nous transporter. Ces images ne se limiteront plus à des représentations passives du monde connu. Elles doivent être explorées, comme un nouveau continent, une nouvelle planète, une nouvelle dimension. Notre instinct d’aventure est inscrit dans notre ADN et les nouvelles générations ne font pas exception. Les jeunes d’aujourd’hui ont soif d’aventure, rien de nouveau, mais une aventure actualisée pour refléter les tendances actuelles. Pas un voyage vers l’infini et au-delà, mais un voyage intérieur, un voyage pour l’esprit, avec pour objectif ultime de contrôler ses propres rêves. Un voyage respectueux de l’environnement, beaucoup plus économe en carburant et peut-être même illimité.
Définir cette quête est le défi ultime auquel est confrontée l’industrie de l’expérience. Et la clé de ce défi repose sur une question qui peut sembler simple, mais qui est absolument fondamentale : de quoi rêvons-nous ? C’est la première question que je pose lorsque je reçois le brief d’un client. Et aujourd’hui, alors que les questions de santé, d’inclusion sociale et de projets civiques occupent une place centrale dans nos vies, nous incitant, espérons-le, à réévaluer véritablement nos vies et à remettre en question notre façon de faire les choses, cette question revêt d’autant plus d’importance, tant pour les individus que pour les marques. Les marques ont le pouvoir, et peut-être même le devoir, d’influencer l’évolution de la société. Elles doivent passer d’une raison d’être à une raison d’agir.

Personnellement, mon rêve est de travailler dans un secteur qui réduit considérablement le nombre d’expériences proposées, mais qui en améliore considérablement la qualité : des expériences plus inclusives et immersives, afin d’offrir aux gens des voyages intérieurs épiques, riches de sens et de messages positifs.
Chez Superbien, nous pensons que trois piliers soutiennent les expériences de rêve que nous souhaitons créer :
- OUVRIR L’ESPACE
Un événement n’est plus limité par l’espace. Il est temps de concevoir des décors multiplexes.
Les lieux physiques sont améliorés numériquement et connectés à des espaces numériques, amplifiant ainsi la participation et l’interaction.
- PROLONGER LE TEMPS
Nous devons créer des moments de partage et d’interaction en direct entre les mondes physique et numérique.
Ces moments d’interaction ne peuvent plus se concentrer sur un seul instant, mais doivent s’étendre dans le temps, pour converger à des moments précis.
- FAIRE CONVERGER LES PUBLIC
L’expérience est multi-entrée. Elle peut être vécue dans la vie réelle, via son appareil, avec une interaction facultative, en synchronisation avec son emplacement, son fuseau horaire, etc.
Nous prévoyons toutefois de rendre l’interaction entre tous les participants et les flux de contenu plus fluide, instantanée et améliorée.
En conclusion, j’aimerais revenir sur la pierre angulaire de ces piliers, à savoir l’écran et notre relation avec lui. En tant que concepteurs d’expériences, il nous appartient de veiller à ce qu’ils nous transportent plutôt que de nous confiner, nous connectent plutôt que de nous séparer, nourrissent et satisfassent notre créativité, et surtout, soient la porte d’entrée vers un nouvel espace.
Un espace qui existe au-delà et entre les écrans, où le physique et le numérique se confondent. Nous aimons l’appeler SuperSpace. Bienvenue.
TOM SCALABRE, CO-OWNER / CREATIVE DIRECTOR chez SUPERBIEN